Et si le vide était la source de tout ?

Et si le vide était la source de tout ?
La vie surgit du vide
« Ce n’est pas en remplissant l’agenda qu’on remplit une vie. »
Fabrice Midal

Au commencement était le vide, le néant. De ce néant est né l’univers. Au commencement était l’utérus. Dans cet espace vide se crée la vie et la continuité de l’espèce humaine.

Et pourtant, le vide nous donne le vertige et fait peur. On se sent obligé de remplir le vide, de combler les silences. On remplit nos vies de tout et n’importe quoi par peur de ce vide, et pourtant nos vies continuent à être vides de sens pour la plupart d’entre nous.

Pourquoi est-ce que l’un est accepté et pas l’autre ?

Vivre une vie vide de sens fait de nous des machines, des automates, des pions interchangeables et sacrifiables. On fait des choses parce qu’il faut les faire, parce qu’on doit les faire, parce que "c’est comme ça", sans réfléchir. Mais comme ça, nos journées semblent remplies et satisfaisantes parce qu’elles ne sont pas vides. On s’est agité dans tous les sens toute la journée, même si on ne sait pas trop pourquoi, au final. Et on passe notre temps à râler — au mieux de ne pas avoir une minute à soi, au pire on fait un burn-out, le corps et l’esprit lâchent. Ils n’en peuvent plus.

Alors pourquoi c’est si dérangeant de s’entourer de vide ? Aucun événement social dans l’agenda, aucune notif sur le téléphone, pas de to-do, rien. Juste toi, ta respiration, tes pensées, tes 5 sens.

Ressens le vide. Cet espace réceptif, obscur et profond, nécessaire pour que l’action ait du sens. Non seulement pour lui donner du sens, mais aussi pour donner forme au beau.

Comme ce creux dans la vague, juste avant qu’elle ne roule et déferle. C’est ce vide qui donne toute sa grâce au mouvement. Sans cet espace, la vague ne serait qu’un mur d’eau.

Le vide structure aussi. Dans l’esthétique japonaise, par exemple, le concept de "Ma" désigne l’espace vide entre les choses, l’intervalle, la pause. Il est considéré comme essentiel à l’harmonie. Le vide n’est pas à remplir, il est là pour respirer. Il crée de l’harmonie, de la tension, de la poésie. Sans ce vide, il n’y aurait pas de calme, pas de présence. Sans silence, il n’y a pas de rythme.

« Rien ne pousse plus fort que ce qui a germé dans le silence. »
Marc de Smedt

J’ai passé ces derniers temps à me confronter à ce vide. Je dis "confronter", mais je me suis rendue compte qu’il n’a rien de belliqueux. Il est là pour nous envelopper dans une bulle de paix, pour prendre soin de nous, pour nous laisser l’espace de nous reconstruire. Mais il faut d’abord savoir le dompter, lui montrer qu’on veut de lui. Il faut lui montrer qu’on est prêt à l’accepter pour que l’expérience soit positive.

Aujourd'hui, je me sens à l’aise avec ce vide, à tel point qu'il a fini par m’ouvrir les portes de la créativité originaire.

La créativité originaire, c’est celle qui ne cherche pas. Elle n’a pas la volonté de créer quelque chose, mais la capacité à se laisser traverser. Elle émerge quand tu te retires, quand tu fais silence en toi, que tu cesses de remplir, de vouloir, de prouver. C’est un mouvement lent, organique, presque mystique, qui ne vient pas de toi, mais à travers toi. Elle ne ressemble pas à une idée brillante griffonnée sur un post-it. Elle ressemble à une vague qu’on sent monter au loin, au creux du ventre.

C’est la création qui n’a pas d’objet encore, mais qui cherche un corps pour s’incarner. C’est l’élan avant le geste, le souffle avant la parole, le battement avant le chant. C’est ce qui précède la forme, mais contient déjà tout.

Parfois, on a l’impression qu’il ne se passe rien parce qu’on ne regarde qu’en surface, et le vide apparent nous fait penser qu’il n’y a rien. Mais pourtant, sous la surface, il y a une racine en train de s’allonger, de se fortifier. Il y a un noyau en train de se préparer à s’ouvrir pour laisser sortir la majestueuse tige.

« Il faut laisser du temps au temps. Le temps fait bien les choses, mais il déteste être pressé. »
Jacques Salomé

En observant la nature, j’ai arrêté d’être impatiente et de vouloir tout, tout de suite. Ce vide est en train de créer en moi quelque chose de magnifique : une nouvelle graine qui enracine en moi de nouvelles croyances. Parce qu’on ne peut pas obtenir des pommes si on plante des graines de poires. J’ai tout rasé, j’ai fait le vide, j’ai déraciné les mauvaises herbes. Et un jour, je récolterai les fruits de ce moment de grâce, mais cela prendra le temps que ça doit prendre. Je respecte mon propre rythme.

« Être libre, ce n’est pas faire ce que l’on veut. C’est ne pas être prisonnier de ce qu’on croit devoir faire. »
Alexandre Jollien

Bon, si ce texte est un peu trop mystique, en gros, voilà pourquoi tu dois créer du vide autour de toi :

  1. Quand on est trop occupé, trop pris dans le feu de l’action, on n’a pas le temps d’observer et de se poser les bonnes questions :
    • Est-ce que j’ai vraiment besoin de faire tout ce que je fais ?
    • Est-ce que ça m’apporte vraiment quelque chose ou est-ce que ça ne fait qu’alourdir ma charge mentale ?
    • Est-ce que je prends suffisamment de temps pour recharger les batteries et continuer à fonctionner correctement ?
    • Est-ce que mes actions me rapprochent de la vie de mes rêves, ou est-ce qu’elles m’en éloignent tellement que je ne rêve même plus ?

Si tes actions ne sont pas alignées avec ce à quoi ton âme aspire vraiment, tu ressentiras de la résistance, du stress, et de plus en plus de maladies. Donc ce n’est pas juste quelque chose de trendy, c’est vital — si tu veux vivre longtemps et en bonne santé bien sûr. Sinon, vas-y, continue, crame-toi vite. Comme on dit : live fast, die fast.

« Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas, c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles. »
Sénèque
  1. Quand on ne fait pas de vide autour de soi, on n’a pas le temps de se retrouver face à soi-même, pour travailler nos peurs, nos croyances limitantes, notre amour propre. Et donc on passe à côté de son propre potentiel, de ce que l’on pourrait être si on arrêtait de se dire que ce n’est pas possible ou que ce n’est pas fait pour nous.

Si tu trouves l’idée de te retrouver face à toi-même inconfortable, sors de ta zone de confort. Ta zone de confort est un carré. La vie, elle, est un cercle beaucoup plus vaste. Presque infini. Tu serais surpris par toutes les possibilités qui existent, dont tu n’avais même pas conscience, enfermé·e dans ta zone de confort.

« Il n’y a pas de plus grande liberté que d’être soi-même sans chercher à plaire. »
Virginia Woolf

Je suis mère, freelance et célibataire. Pas le cocktail le plus safe ni le modèle le plus courant. Pourtant, je peux t’assurer que je vis en ce moment la meilleure partie de ma vie.

Carl Jung disait que la vie ne commençait qu’à partir de 40 ans, et qu’avant ce n’était que de l’expérimentation. J’ai aujourd’hui 44 ans et je pense que l’expérimentation est en train de prendre fin. Je me sens maintenant suffisamment libre et confiante pour vivre la vie selon mes propres règles. J’ai arrêté de courir après la productivité malsaine et de remplir des cases que je n’ai même pas choisies. Plus de cases, plus de cages, plus de fuite en avant.

Plus besoin de prendre des photos de chaque instant de ma vie pour montrer au monde comme elle est bien. Je le sais. Je n’ai besoin du like de personne pour me le confirmer.

Plus besoin, d’ailleurs, de vouloir aller dans des endroits super instagrammables pour trouver du beau. Plus besoin de voyager loin pour m’évader.

J’ai trouvé mon espace. Un espace dans lequel je me sens en paix, où je suis moi-même et où ma seule activité est de regarder et d’apprendre de la vie elle-même : des plantes, des arbres, du cycle de la vie, du soleil, de l’air, de la terre. Ce sont les meilleurs mentors que j’aie connus jusqu’à présent, et grâce à eux j'aspire à créer, moi aussi, du beau.

Ma plante la plus précieuse étant ma fille, que je ne veux plus élever dans la compétition, l’avoir et le paraître, mais dans l’être. Pour qu’elle sache à quel point elle est aimée juste parce qu’elle EST, pas pour ce qu’elle fait ou donne.

Comme mes autres plantes. Je les aime parce qu’elles sont elles. Pas parce qu’elles me produisent plus de fleurs, ou parce qu’elles ont réussi à économiser leur besoin en eau pour que je n’aie plus à les arroser autant.

Si tu as lu jusqu’ici, je t’invite sincèrement à ralentir, à te poser les bonnes questions, et à te recentrer sur l’essentiel. Pour ton bien-être. Sois ta propre priorité. Découvre le potentiel caché en toi, laisse la graine germer librement, sans peur du jugement. Tu verras à quel point tu es un être unique, qui mérite d’être apprécié comme tel.